La prévention des impayés

Les impayés sont le fléau des entreprises. Aucune n’est épargnée, et les plus vulnérables sont bien souvent les plus petites et les plus jeunes. De même, les entreprises qui réalisent une partie importante de leur chiffre d’affaires (par exemple plus du tiers) avec un seul client sont étroitement liées à la santé de celui-ci. Enfin, l’augmentation des incidents de paiement sur les chèques et les interdits bancaires expose aussi fortement les commerçants. Nul n’est à l’abri des mauvais payeurs, encore moins des escrocs.

Les impayés sont aujourd’hui l’une des causes principales de défaillance des entreprises. Valoxy, cabinet d’expertise comptable dans les Hauts de France, détaille l’arsenal des techniques de défense et de prévention des impayés.

 

 Les impayés

Dans le meilleur des cas, une facture impayée perturbe la gestion de l’entreprise. Car pour compenser les pertes correspondantes, elle devra générer un chiffre d’affaires supplémentaire. Lequel ? A titre indicatif, le tableau ci-contre présente le chiffre d’affaires à réaliser en fonction du taux de marge bénéficiaire (comprenez le résultat courant par rapport au chiffre d’affaires) pour compenser un impayé.

  • quelle compensation ?

Ayez toujours à l’esprit le calcul suivant : si votre résultat net annuel représente 10 % de votre chiffre d’affaires, vous devrez vendre l’équivalent de dix fois le montant d’un impayé pour le compenser. Et à la perte de chiffre d’affaires, s’ajoutent les frais divers de recouvrement, le temps consacré à la procédure, sans compter que le client perdu est aussi un manque à gagner pour l’avenir.

Afin de réduire le risque d’impayés, des méthodes rigoureuses sont à mettre en place dans le traitement des créances clients, depuis l’approche du prospect, en passant par le traitement de la commande jusqu’au recouvrement de la facture. Le montant de la dette, l’importance du client, la fréquence comme la qualité des relations commerciales avec celui-ci seront autant d’éléments à prendre en compte pour adapter la forme et le contenu des actions à mettre en œuvre.

 

La prévention des impayés

 Premier commandement : se renseigner

La première précaution à prendre est de se renseigner sur la solvabilité du client. S’il s’agit d’une entreprise commerciale, vous pouvez obtenir du greffe du tribunal de commerce de précieuses informations.

Quelles informations rechercher ?

Pour l’essentiel l’état civil, le régime matrimonial des personnes physiques comme celui des associés d’une SNC par exemple, la désignation de la ou des personnes habilitées à engager la responsabilité de l’entreprise ou de la société, l’origine du fonds et les principales caractéristiques de l’affaire, sans oublier la connaissance de quelques accidents de parcours comme la diminution de l’actif net d’une SARL faisant suite à une perte importante.

Où trouver ces informations ?

Concrètement, il vous est possible d’obtenir (moyennant une somme modique) la copie des comptes annuels, dès lors qu’il s’agit d’une société. Vous voulez savoir qui est propriétaire d’un immeuble ? Savoir s’il est hypothéqué et pour quelle valeur ? Le bureau de la conservation des hypothèques ou le cadastre peut fournir ces informations, même si la procédure n’est pas des plus simples. Vous pouvez aussi demander à votre banquier quelques informations sur un client potentiel. Les renseignements que vous obtiendrez seront cependant limités. S’il considère confidentiels le montant des crédits en cours ou la position des comptes, vous n’obtiendrez que des informations d’ordre général sur la situation commerciale ou financière d’une personne avec qui vous envisagez de travailler.

Autre source d’informations possible, les sociétés de renseignements commerciaux ou d’assurance-crédit, (Coface, Altares, Pouey, Euler, etc.) et les bases de données privées qui, moyennant un abonnement, vous fourniront des informations souvent plus complètes, analysées, recoupées et vérifiées. Enfin, les sociétés d’assurance

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Deuxième commandement : se ménager des preuves

Les difficultés que vous rencontrez lors du recouvrement de vos créances trouvent souvent leur source dans des contestations liées à la qualité de la prestation ou des produits fournis. C’est donc au moment où vous vous mettez d’accord avec votre client (votre futur débiteur) que vous pouvez tuer dans l’œuf des éventuels prétextes d’impayés. Cette façon de voir peut surprendre plus d’un chef d’entreprise qui n’imagine pas que ses relations avec la clientèle constituent des contrats, même en l’absence de trace écrite. Or, le contrat naît dès que vous vous mettez d’accord avec votre client sur la chose à livrer ou les travaux à effectuer ainsi que sur leur prix. Dès lors, les obligations et les droits qui en découlent s’imposent aux deux parties. Si cet accord réciproque peut être simplement tacite, l’écrit reste la méthode la plus sûre pour prouver sa créance, en particulier devant un juge.

  • devis et bon de commande

Si nombre de documents échangés avec la clientèle peuvent prouver l’existence d’accords, en pratique, la pièce considérée le plus souvent comme à l’origine du contrat est celle qui établit la commande, appelée « bon de commande » pour une marchandise ou un article ou bien « devis » pour l’exécution d’un travail.

Pièce maîtresse, le devis est un état détaillé des travaux à entreprendre et des fournitures nécessaires à leur exécution. Toutes les prestations y sont détaillées, décrites, chiffrées, mais le prix global et définitif n’est pas nécessairement fixé dès le départ, car il ne peut souvent être déterminé qu’au fur et à mesure de l’avancement du travail. Un devis doit faire l’objet d’une rédaction très rigoureuse. Si la loi ne prescrit aucune forme particulière, un certain nombre de renseignements doivent cependant y figurer comme la nature et l’importance des travaux, le prix à payer, les modalités de paiement, les conditions de révision des prix, le délai d’exécution des travaux, etc. Il est aussi prudent d’émettre des réserves sur les travaux imprévisibles ou de prévoir une clause pour les suppléments de travaux demandés en cours d’exécution par le client.

 

 

Les différents documents que nous venons de passer en revue aboutissent à un document qui les constate en même temps qu’il les chiffre : la facture. Pour être valable, celle-ci doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires. Parmi elles, citons les nom et adresse du client, la mention « facture », la date, le détail et le prix unitaire des produits ou des services, la TVA, le terme du paiement… Pour les entreprises du bâtiment, nous rappelons qu’il est impératif d’y distinguer la partie « matériaux » de la partie « main d’œuvre ». A défaut d’une telle ventilation, les sanctions peuvent être lourdes de conséquences.

 

Troisième commandement : se garantir

Un bon contrat doit permettre de trancher un litige à sa seule lecture, mais il doit prévenir aussi toute contestation à naître en cours d’exécution. Vous pourrez sécuriser davantage encore vos relations avec la clientèle en prévoyant des conditions générales de vente (CGV). De quoi s’agit-il ? Sont-elles obligatoires ? Une chose est sûre : si les conditions d’un contrat sont négociables, les clauses insérées dans les conditions générales de vente ne le sont pas. Parmi elles, certaines sont essentielles, voire impératives. Plusieurs textes réglementaires font par exemple référence aux conditions de paiement.

  • Des délais de paiement réglementés

En vertu de l’article L.441-6 du Code de commerce, les conditions générales de vente doivent en effet comporter des clauses relatives aux délais de paiement. S’ils peuvent être librement fixés par les parties, en l’absence de dispositions particulières, le prix devra être payé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation demandée. C’est le principe.

Des délais particuliers sont prévus pour certains produits alimentaires. De plus, pour faciliter les éventuelles procédures de recouvrement, les conditions générales de vente doivent également préciser les modalités d’application et le taux d’intérêt des pénalités dues en cas de retard de paiement.

Dans pareille situation, le taux d’intérêt ne peut être inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal. A défaut de précision, le taux de référence est celui appliqué par la Banque Centrale Européenne (BCE) à son opération de refinancement la plus récente, majoré de dix points : un taux assez malaisé à manipuler du fait des variations qui dépendent de la politique monétaire…

Les pénalités sont exigibles sans qu’aucun rappel ne soit nécessaire. Le plus souvent appliquées après une mise en demeure du créancier, elles peuvent courir de plein droit dès le jour suivant la date de règlement portée sur la facture ou, à défaut, le trente et unième jour suivant la date de réception des marchandises ou de l’exécution de la prestation.

  • Quelles autres clauses insérer ?

D’autres clauses applicables en cas de non-paiement permettent d’accélérer le recouvrement de la facture : elles sont essentielles lorsque le débiteur risque d’être soumis à une procédure collective. La « clause de déchéance du terme » est utile lorsque le débiteur bénéficie d’un échéancier de paiement. Tout incident se produisant au paiement de l’une des échéances rend exigible immédiatement la totalité des créances restant dues. La « clause pénale » a pour objet de fixer de manière forfaitaire le montant des dommages et intérêts susceptibles d’être versé au cas où l’une des parties ne remplit son obligation.

La « clause résolutoire » permet à une partie de réclamer l’exécution ou d’exiger la résolution du contrat. Un exemple ? A défaut de paiement du client, la vente est annulée et le vendeur redevient automatiquement propriétaire du bien.

  • La réserve de propriété

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  • Les conditions générales de vente

Les conditions générales de vente (CGV) doivent être portées à la connaissance et à l’assentiment du client, au plus tard au moment de la conclusion du contrat, et figurer sur un document écrit. Aucune forme n’est exigée par la loi : il peut s’agir d’un document contractuel (bon de commande, contrat…), d’un document précontractuel comme un catalogue, un tarif ou une publicité, ou bien encore d’un document annexe, par exemple une affiche apposée distinctement dans les locaux de l’entreprise.

Attention, si elles sont imprimées au dos d’une facture, il est recommandé d’insérer, au recto, un encadré nettement visible, où l’on pourra lire la mention « voir nos conditions générales au verso ». En tout cas, sachez que la rédaction de ces conditions générales de vente ne sont pas du ressort d’un imprimeur, mais bel et bien une affaire de juriste… qu’il ne faut pas hésiter à consulter (par exemple un avocat d’entreprise).

 

Le recouvrement des impayés

Vous pensiez avoir mis toutes les chances de votre côté. Et pourtant, l’un de vos clients vous file entre les doigts. Que faire ? La réponse est sans appel : agir vite. Car, à l’inverse d’un bon cru de Bordeaux, une créance ne se bonifie pas avec le temps !

 

Se faire justice soi-même ?

Les procédés susceptibles de fléchir la volonté de votre débiteur ne manquent pas. Si une certaine dose d’intimidation est permise, il n’en demeure pas moins que vous devez rester dans des limites qui préservent sa liberté, sa vie privée comme sa dignité. Il y a longtemps qu’on n’embastille plus les gens pour un chèque impayé, mais, idéalement, comment procéder ?

Relance

Pour commencer, un premier appel téléphonique : le ton est courtois. Une semaine plus tard : la relance téléphonique plus musclée. Pas de réponse deux semaines après : on passe alors à l’écrit. Ce genre de lettre amène assez souvent le client de bonne foi, celui qui est simplement négligent ou momentanément gêné, à régler son dû, ou tout au moins à proposer un paiement échelonné. Mais face aux clients de mauvaise foi, il faut se montrer plus ferme et renouveler l’opération.

Attention cependant à ne pas donner à vos lettres l’apparence de documents judiciaires en les intitulant, par exemple, « sommation » ou « commandement de payer ». Il n’y a pas de délai particulier entre chaque rappel. Tout est fonction du montant de la créance, de la personnalité du débiteur, des relations de  l’entreprise avec lui…

Mise en demeure

Inutile cependant de lui expédier une multitude de lettres de relance : deux lettres, c’est un maximum. Si vos missives restent sans effet, c’est l’heure de la mise en demeure. Cette « mise au pied du mur » prend alors la forme d’une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).

 Un conseil : envoyez-la sans enveloppe, de manière à ce que votre débiteur ne puisse prétendre n’avoir reçu qu’une enveloppe vide. Il existe des modèles de plis à coller sous le nom de « lettre charmante ».

Aucune mention obligatoire n’est exigée. Elle doit simplement être rédigée dans des termes suffisamment clairs et formels. Elle doit permettre une véritable prise de conscience chez son destinataire. Si vous le souhaitez, cette lettre peut être transmise (voire remise en mains propres) par un huissier : une manière de donner à votre action un caractère plus solennel.

L’intérêt de la mise en demeure ? Il est double. D’abord, si un contentieux  s’engage plus tard, la lettre sert à prouver la mauvaise foi du débiteur. Ensuite, elle constitue le point de départ pour le calcul des éventuels intérêts de retard.

 

Tenter les voies judiciaires

Vous avez épuisé toutes les solutions qui s’offraient à vous pour régler votre litige à l’amiable. Sans résultat. Vous pouvez alors tenter d’obtenir une décision du juge pour contraindre votre débiteur à payer.

  • L’injonction de payer

 L’injonction de payer est une procédure de recouvrement de créances. Son but ? Obtenir un titre exécutoire. Son intérêt ? Rapide, elle n’est pas trop onéreuse. Toutes les créances sont visées, peu importe leur montant, qu’elles soient civiles ou commerciales. Comme toute action judiciaire, l’injonction ne présente d’intérêt que si vous avez quelque chance de récupérer le montant de la créance, majoré des frais que vous avez engagés et que vous engagerez.

Comment procéder ? Vous rédigez votre requête sur papier libre ou sur un formulaire-type, vous-même ou bien par l’intermédiaire de votre mandataire (un huissier ou un avocat). Elle est ensuite adressée au tribunal compétent. Les documents justifiant la créance l’accompagneront : devis ou bon de commande, éventuellement bon de livraison, facture, lettre(s) de relance. L’envoi d’une lettre (recommandée avec AR) de mise en demeure précédera aussi la requête.

Attention, on vous la réclamera comme justification du refus de paiement. S’il considère votre demande fondée, le juge rend alors une ordonnance en injonction de payer… que vous pourrez faire signifier au débiteur par l’intermédiaire d’un huissier. A défaut de paiement, la formule dite « exécutoire » s’applique : elle autorise une saisie.

  • L’assignation en paiement

 Cette procédure, plus traditionnelle, poursuit la même finalité que la précédente : se faire payer. Elle est plus longue, plus onéreuse aussi ; il faut généralement se faire assister d’un avocat. La procédure est un peu plus complexe. La demande présentée devant le tribunal doit être constituée par acte d’huissier. Cet acte assigne le défendeur à comparaître devant le tribunal. De deux choses l’une :

  • Il reconnaît sa dette, auquel cas le tribunal le condamne à la payer, avec au besoin un plan d’échelonnement.
  • Le défendeur la conteste. Il lui appartiendra alors d’apporter la preuve de son bon droit. Ainsi, le juge pourra statuer.

 

Pour plus d’informations sur la prévention des impayés, consultez nos articles sur le blog Valoxy :

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